رسانه های آمریکایی و افتضاح در عراق
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Les médias américains et la débâcle en Irak
Par Bill
Van Auken
Mondialisation.ca, 19 juin 2014
wsws.org
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Un article écrit par Chelsea (Bradley) Manning depuis sa cellule
de la prison militaire de Fort Leavenworth, dans le Kansas, a
davantage contribué à mettre en lumière les vraies sources de la
débâcle actuelle de l’impérialisme américain en Irak que tous
les mensonges et les articles de déni produits par tous les
experts grassement payés du New
York Times, du Washington
Post et des autres grands journaux.
Cet article du soldat américain emprisonné, publié dans le New
York Times de dimanche, vise à révéler le rôle du
secret et du contrôle des médias par le gouvernement, dans ses
efforts pour imposer à la population américaine une guerre
d’agression lancée sur la base de mensonges.
Manning insiste sur l’idée que l’effondrement soudain de l’armée
irakienne financée et entraînée par les États-Unis et la plongée
du pays dans une véritable guerre civile sectaire ne font que
démontrer que les inquiétudes qui avaient motivé sa transmission
à WikiLeaks de 700 000 documents secrets sur les guerres d’Irak
et d’Afghanistan ainsi que sur les manigances de la politique
étrangère américaine sur toute la planète « n’ont pas été
résolues. »
Le fait que Manning ait rompu le mur du secret et de la
désinformation, maintenu par le gouvernement et les médias, a
provoqué la colère de l’élite dirigeante américaine. Ce soldat,
ex-analyste des services du renseignement, purge maintenant une
peine de prison de 35 ans. En avril dernier, un général de
l’armée de terre a refusé une demande de clémence.
Manning examine la réaction américaine à l’élection en 2010 du
premier ministre Nouri al-Maliki, qui avait été installé par
l’occupation américaine quatre ans plus tôt. La presse
américaine, « était inondée d’articles déclarant que ces
élections étaient un succès, » afin de créer l’image d’une
guerre américaine qui aurait « réussi à créer un Irak stable et
démocratique » rappelle le soldat emprisonné.
Durant la même période, écrit-il, lui et d’autres analystes
militaires à Bagdad recevaient continuellement des rapports sur
« une répression brutale des dissidents politiques de la part du
ministère de l’Intérieur irakien et de la police fédérale, »
agissant pour le compte de Maliki. Les opposants au premier
ministre soutenu par les États-Unis « étaient souvent torturés,
ou même tués, » note-t-il.
Manning révèle au grand jour la complicité directe de l’armée
américaine dans ces crimes, indiquant qu’il avait informé
l’officier américain en charge de l’Est de Bagdad que 15
individus arrêtés pour avoir publié une critique du gouvernement
de Maliki « n’entretenaient absolument aucun lien avec le
terrorisme. » Ce commandant avait répondu qu’il « n’avait pas
besoin de cette information et que je ferais mieux d’aider la
police fédérale à localiser davantage d’imprimeries
”anti-irakiennes”. »
« J’ai été choqué par la complicité de notre armée dans la
corruption de ces élections. Pourtant ces détails profondément
troublants sont passés inaperçus pour les médias américains, »
écrit-il.
Ce compte-rendu dément ce que les médias américains affirment en
choeur : que la débâcle actuelle en Irak serait « entièrement de
la faute de Maliki. »
Manning attribue les divergences aiguës entre les développements
en Irak et la manière dont ils sont dépeints par les médias en
partie à la censure pratiquée par le Pentagone sur la couverture
de la guerre par le système des journalistes « embedded »
(intégrés). Les journalistes qui avaient de bonnes relations
avec l’armée et qui fournissaient une couverture médiatique
favorable avaient un accès, alors que ceux qui révélaient les
scandales, les crimes et les mensonges étaient mis sur une liste
noire, écrit-il.
Il ne fait aucun doute que ce système de censure militaire a
joué un rôle majeur pour cacher au peuple américain le caractère
macabre et criminel d’une guerre qui a coûté la vie à plus d’un
million d’Irakiens, et tué près de 4 500 soldats américains, en
laissant des dizaines de milliers d’autres blessés.
Cependant, le processus de « l’intégration » des journalistes
avait commencé bien avant que Bush n’ordonne de lancer une
opération de « shock
and awe » (choc et effroi, ou domination rapide)
contre Bagdad, et il n’incluait pas seulement les correspondants
de guerre, mais aussi les principaux chroniqueurs,
éditorialistes, et directeurs de publication des grands journaux
et autres médias.
Des gens comme le directeur de la publication du Times Arthur
Ochs Sulzberger Junior, et Bill Keller, qui en 2003 était passé
de la position de journaliste confirmé et principal partisan de
la guerre à celle de rédacteur en chef au Times,
s’étaient adonnés sans retenue à une campagne massive pour faire
pression sur la population américaine afin qu’elle soutienne une
guerre d’agression contre l’Irak. Ils décidèrent de répéter
comme des perroquets les mensonges du gouvernement américain sur
les « armes de destruction massive » irakiennes et les liens
entre Bagdad et Al Qaïda, tout deux inexistants, et d’éviter
toute enquête critique sur la propagande de guerre du
gouvernement Bush. Au contraire, à travers les efforts sinistres
du Times et
de sa correspondante Judith Miller, ils avaient rajouté à cette
propagande, y empilant leurs propres mensonges.
Maintenant, alors que toute l’ampleur de la débâcle créée par la
destruction aveugle de la société irakienne est révélée, ceux
qui avaient servi de propagandistes de guerre dans les médias
serrent les rangs, cherchant à protéger leurs propres arrières.
Des chroniqueurs comme Thomas Friedman du Times, qui
écrivait il y a plus de dix ans que personnellement « une guerre
pour le pétrole ne lui posait aucun problème », et Nicolas
Kristof ont publié des articles insistant sur l’idée que Maliki
serait le seul responsable de la désintégration de l’Irak, et
que les États-Unis n’ont rien à voir avec cela.
Après eux, lundi, une chronique particulièrement immonde du
chroniqueur duTimes Roger
Cohen intitulée « reprendre Mossoul » a été publiée, qui appelle
à une intervention des États-Unis pour « faire reculer les
fanatiques de l’EIIL (État islamique d’Irak et du Levant). »
Cohen se sert de cet article pour ridiculiser ceux qui jouent au
« jeu des reproches », une dénonciation hautement cynique de
toute tentative d’assigner des responsabilités pour une guerre
qui a tué plus d’un million de gens et détruit toute une
société.
« Les faits sont suffisamment clairs, » écrit-il « les
États-Unis ont envahi l’Irak en 2003 en raison de ses armes de
destruction massive. Cependant, l’Irak n’avait aucune arme de
destruction massive. » Suffisamment clair en effet, la guerre
s’appuyait sur un mensonge, que Cohen a contribué à disséminer.
Il continue : « Il n’y avait pas d’Al Qaïda dans l’Irak de
Saddam. Les États-Unis l’ont fait naître par leur invasion. »
Donc, encore un mensonge utilisé pour justifier la guerre, dont
les conséquences catastrophiques comprennent le renforcement des
tendances islamistes extrémistes et sectaires en Irak et dans
toute la région.
Dans son article, Cohen demande que le gouvernement Obama lance
« une force militaire ciblée » contre les « fanatiques » de
l’EIIL. Mais il a soutenu avec enthousiasme l’usage par
Washington de ces mêmes « fanatiques » dans les guerres pour
obtenir un changement de régime, d’abord en Libye puis en Syrie.
Il écarte toutes les questions sur la logique de ce genre de
politique : « Une approche logique au Moyen-Orient est rarement
une approche faisable. » La seule « logique » est l’usage de
n’importe quel instrument à disposition pour affirmer
l’hégémonie américaine et piller les ressources de la région.
« Le jeu des reproches passe à côté du problème, » répète Cohen.
L’Irak comme la Syrie étaient « mûrs pour le démembrement »
avant « la malheureuse intervention de l’Amérique »
De qui se moque-t-il ? L’intervention américaine était tout sauf
« infortunée, » elle a employé toute la puissance de feu dont
disposait le Pentagone dans une campagne qui a vu plus de 1700
missions de bombardement, dont 504 avec des missiles de
croisière, en l’espace de trois jours.
On pourrait aussi bien décrire l’Europe de 1939 comme étant «
mûre pour le démembrement » et la blitzkrieg de
Hitler comme « infortunée » ou critiquer le tribunal de
Nuremberg comme un exercice futile de « jeu des reproches. »
La réalité c’est que l’on n’a toujours pas désigné les vrais
coupables. Cela requiert que ceux qui sont responsables de la
planification et de l’exécution de cette guerre d’agression
contre l’Irak, de Bush, Cheney, Rumsfeld, Rice et Powell
jusqu’aux commandants militaires les plus haut placés, soient
jugés pour crimes de guerre.
Il convient de rappeler qu’à Nuremberg, sur le banc des accusés,
et finalement au bout d’une corde, se trouvait, aux côtés des
dirigeants survivants du Troisième Reich, Julius Streicher, le
rédacteur du répugnant hebdomadaire antisémite Der
Stürmer puis du quotidien Fränkische
Tageszeitung. Si le tribunal a établi que Streicher
n’avait joué aucun rôle direct dans la formulation de la
politique de guerre, il avait néanmoins joué un rôle crucial
dans l’intoxication de la conscience du peuple allemand. Sans
les efforts de propagande de Streicher, avait affirmé
l’accusation, « les généraux allemands n’auraient trouvé
personne pour suivre leurs ordres. »
Dans une situation où il faudra vraiment répondre des crimes de
la guerre d’Irak, Cohen, Friedman, Keller et consorts qui ont
servi avec enthousiasme la machine de propagande du Pentagone,
devront être jugés de manière similaire pour leur promotion
criminelle d’une guerre d’agression.
Bill Van Auken
Article original, WSWS,
paru le 17 juin 2014
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