مورخان،
11سپتامبر و ارتش سری گلادیو
http://www.mondialisation.ca/les-historiens-le-11-septembre-et-les-armees-secretes-de-gladio/5383429
Les historiens, le 11-Septembre et les armées secrètes de Gladio
Par Dr.
Daniele Ganser
Mondialisation.ca, 22 mai 2014
journalof911studies.com
![](img33.jpg)
Les historiens d’aujourd’hui et de demain font face à un énorme
défi : relater les événements du 11 septembre 2001. Ce qu’ils
écriront sera enseigné dans les livres d’histoire. Mais que
raconteront-ils ? Est-ce Ben Laden qui a envoyé 19 musulmans
attaquer par surprise les USA ? Ou bien écriront-ils que
l’administration du Président George W. Bush est responsable de
l’attaque, soit en la concevant elle-même, soit en la laissant
délibérément se produire de façon à générer un choc au sein de
la population américaine et à créer un prétexte pour augmenter
drastiquement les dépenses militaires et pour attaquer
l’Afghanistan et l’Irak ?
J’ai étudié la plupart des données relatives aux événements du
11-Septembre, et je suis convaincu qu’une nouvelle enquête est
nécessaire. Mais lorsque j’ai remis en cause la narrative
officielle du 11/9 dans mon pays natal, la Suisse, j’ai dû faire
face à de vigoureux reproches de la part de nombreuses
personnes. On m’a par exemple demandé pourquoi un gouvernement,
quel qu’il soit, devrait attaquer sa propre population ou, chose
un peu moins criminelle, laisser délibérément un groupe étranger
mener une telle attaque ? Tandis que les dictatures brutales
comme le régime de Pol Pot au Cambodge, sont connus pour le peu
de considération qu’ils portent à la vie et à la dignité de
leurs concitoyens, on est amené à penser qu’une démocratie
occidentale ne se permettrait jamais un tel abus de pouvoir. Et
si des éléments criminels au sein d’une démocratie occidentale,
en Amérique du Nord ou en Europe, avaient perpétré un tel crime,
les élus ou les médias ne s’en rendraient-ils pas compte et ne
le dénonceraient-ils pas ? Est-il concevable que des criminels à
l’intérieur d’un gouvernement puissent mener des opérations
terroristes contre des citoyens innocents, lesquels soutiennent
ce même gouvernement au travers des impôts qu’ils paient tous
les ans ?
Est-il possible que personne ne le remarque ? Voilà des
questions difficiles, même pour des chercheurs spécialisés dans
l’histoire des guerres secrètes. En fait, il existe des exemples
historiques de telles opérations menées par des démocraties
occidentales. Dans cet article, je ne traiterai pas directement
du 11-Septembre, mais plutôt de ce que l’Histoire peut nous
apprendre. Je vous propose d’examiner certaines des informations
les plus récentes concernant les guerres secrètes durant la
Guerre froide. Il existe bel et bien une stratégie militaire
secrète qui utilise le terrorisme contre les populations
civiles. Cela s’appelle la « stratégie
de la tension. » Et une telle stratégie a
effectivement été mise en oeuvre par des démocraties
occidentales.
La stratégie de la tension
Il est sans doute correct de dire que parmi les presque 7
milliards d’êtres humains vivant sur Terre, moins de 1 % a un
jour entendu parler de « stratégie de la tension ». Et parmi
eux, peu nombreux sont ceux capables d’en citer quelques
exemples historiques.
Il s’agit d’une stratégie de l’ombre, connue seulement de
quelques militaires et d’officiers des services secrets (et de
quelques criminels) qui l’ont mise en place, de quelques
officiers de police et de juges qui l’ont combattue, et de
certains journalistes et chercheurs qui ont écrit à son sujet.
Fondamentalement, la stratégie de la tension vise à toucher le
côté émotionnel des gens et a pour but de répandre au maximum la
peur parmi le groupe visé.
La « tension » se réfère à la détresse émotionnelle et à la peur
psychologique, alors que « stratégie » correspond à la technique
permettant d’amener à cette détresse et à cette peur. Un
attentat terroriste dans un lieu public comme une gare, un
marché, un car de ramassage scolaire, est un exemple typique de
procédé auquel la stratégie de la tension fait appel. Après
l’attaque – et c’est là un élément essentiel – les agents
secrets qui l’ont commis imputent le crime à leurs opposants
politiques en effaçant les preuves ou en en créant de fausses.
Notez bien que l’objectif ultime de la stratégie de la tension
n’est pas de tuer ou de blesser des personnes lors d’un attentat
terroriste, comme le pensent la plupart des gens. Les cibles
sont à la fois l’opposant politique, qu’il faut discréditer par
cet attentat, et ceux qui ne sont pas touchés physiquement, mais
qui ont connaissance de l’attentat et qui sont amenés à avoir
peur pour leur vie et celles de leurs proches.
Étant donné que l’objectif de la stratégie de la tension est de
discréditer l’opposant et de créer la peur, les véritables
cibles ne sont pas les personnes qui sont tuées, que leur nombre
soit de quelques dizaines ou de plusieurs milliers, mais les
millions de gens qui ne sont pas atteints physiquement, mais
sont plongés dans la détresse émotionnelle.
La stratégie de la tension forme une partie de ce que l’on
appelle communément « la guerre psychologique » (Psychological
warfare, ou PSYWAR en anglais – NdT). Comme
l’indique l’expression, cette forme de guerre ne s’attaque pas
aux corps des êtres humains, aux tanks, navires, satellites ou
maisons dans le but de les détruire, mais vise les esprits, le
psychisme. Laissons de côté le fait que les philosophes,
psychologues, neurologues ou théologiens ne sont jamais parvenus
à définir complètement ce qu’est l’ « esprit », et partons du
principe, dans le cadre de cet article, qu’il s’agit simplement
de la capacité humaine à penser et à ressentir. Si des personnes
peuvent accéder à nos pensées et à notre ressenti sans que nous
le remarquions, elles peuvent exercer un énorme pouvoir sur
nous.
Mais si nous nous apercevons que notre psychisme est manipulé au
travers d’une guerre psychologique, cette technique perd alors
une partie de ses effets.
La guerre psychologique a joué un rôle central dans la Seconde
Guerre mondiale et toutes celles qui lui ont succédé. Elle a été
utilisée par les commandements américains en Europe, aux
Amériques, en Asie, en Australie et en Afrique. On la désigne
parfois sous le vocable populaire de « propagande », mais la
propagande est seulement une des formes de guerre psychologique.
La stratégie de la tension en est une autre, bien moins connue.
Le Département américain de la Défense définit la guerre
psychologique comme « l’utilisation
planifiée de la propagande et d’autres actions psychologiques
dans le but premier d’influencer les opinions, les émotions, les
attitudes et les comportements de groupes étrangers hostiles, de
manière à contribuer à l’accomplissement d’objectifs nationaux. »[1]
La guerre psychologique peut prendre des formes très différentes
et apparemment sans liens – tracts, affiches ou reportages à la
télévision, tous conçus pour formater la pensée et les
sentiments du groupe visé. Ou bien, elle peut se manifester sous
la forme d’une attaque terroriste menée par des agents secrets
et dont on fait porter la responsabilité à un opposant
politique.
Inutile de préciser que la stratégie de la tension, version
terrorisme, celle qui tue des personnes innocentes, est une
forme de guerre psychologique bien plus brutale et radicale que
le largage de tracts depuis un avion survolant un territoire
ennemi. Mais ces deux formes de guerre psychologique ont en
commun le fait de viser l’esprit, les émotions et les pensées
des gens.
Je vais maintenant donner quelques exemples historiques de
stratégie de la tension ayant utilisé le terrorisme.
À ce jour, les informations les plus pertinentes sur la
stratégie de la tension sont sans aucun doute celles provenant
d’Italie, où des juges, des parlementaires et des universitaires
continuent de mettre en commun leurs efforts pour essayer de
comprendre et de détailler cette stratégie secrète.
Le juge Casson et l’attentat terroriste de Peteano
Le juge italien Felice Casson a redécouvert cette stratégie lors
de son enquête sur plusieurs attaques terroristes survenues en
Italie dans les années 1960, 1970 et 1980. D’après Casson,
l’affaire la mieux documentée dans laquelle la stratégie de la
tension a été utilisée s’est produite dans le village italien de
Peteano. C’est là que le 31 mai 1972, trois membres de la police
paramilitaire italienne, les Carabinieri, ont été attirés vers
une Fiat 500 abandonnée par un appel anonyme et ont été tués
lorsqu’ils ont ouvert le coffre du véhicule en déclenchant la
bombe qui s’y trouvait.
Pendant des années, cet attentat terroriste a été mis sur le
compte des Brigades rouges, une organisation terroriste
d’extrême gauche en Italie. Mais lorsque le juge Casson a
rouvert cette affaire, il a découvert que c’était en réalité le
néofasciste catholique Vincenzo Vinciguerra, un militant
anticommuniste, qui avait commis ce crime.
Casson a également découvert, à sa grande surprise, que
Vinciguerra n’avait pas opéré seul, mais qu’il avait été protégé
par des membres des services secrets militaires italiens,
appelés aujourd’hui SISMI (Servizio
per le Informazioni e la Sicurezza Militare).[2]
Le juge Casson a procédé à l’arrestation de Vinciguerra, lequel
a confirmé lors de son procès en 1984 qu’il avait été
relativement aisé pour lui d’échapper à la justice et de se
cacher, étant donné qu’une large portion de l’appareil
sécuritaire italien, y compris le SISMI, partageait ses
convictions anticommunistes, et avait par conséquent soutenu en
silence ces crimes afin de discréditer la gauche italienne et
tout particulièrement le Parti communiste (PCI), lequel était
relativement fort à l’époque. Après l’attentat à la bombe,
Vinciguerra se souvient que « c’est
tout un mécanisme qui s’est mis en route… Les carabiniers, le
ministre de l’Intérieur, les services de douane, et les services
secrets civils et militaires ont accepté de fait les raisons
idéologiques derrière cette attaque. »
Casson a mis en évidence le fait qu’au travers de ce crime et
d’autres pour lesquels on avait accusé les Brigades rouges –
l’ennemi politique par excellence – c’était en fait le Parti
communiste italien qui avait été discrédité. Les chefs des
services secrets militaires et les politiques ont avancé
qu’après ce crime, le “danger communiste” justifiait
l’augmentation des dépenses militaires et la réduction des
libertés civiles dans l’intérêt de la sécurité de l’État. De
cette façon, la stratégie de la tension, comme celle mise en
oeuvre par l’acte terroriste de Pataneo, a permis de propager la
peur dans toute l’Italie, de discréditer un opposant politique,
et de mettre en place des mesures de sécurité conservatrices. Ce
fut très efficace, puisque personne ne savait à l’époque que les
services secrets étaient derrière cette attaque.[3]
« En
ce qui concerne les services de renseignement, l’attentat de
Peteano fait partie de ce qui a été surnommé la stratégie de la
tension, » a expliqué le Juge Casson à la BBC lors
d’une interview en 1991.
La tension créée à l’intérieur du pays a servi à promouvoir des
tendances sociales et politiques extrêmement réactionnaires et
conservatrices. Alors que cette stratégie était mise en oeuvre,
il était nécessaire de protéger ceux qui étaient effectivement
derrière, puisque des preuves les impliquant étaient peu à peu
découvertes.
Des témoins ont dissimulé des informations pour couvrir les
extrémistes de droite.[4]
Vinciguerra faisait partie de l’organisation fasciste italienne,
Ordine Nuovo (Nouvel Ordre) qui cultivait d’étroites relations
avec le SISMI. Un haut membre d’Ordine Nuovo, Clemente Graziani,
a affirmé dans un livre paru en 1963, qu’en tant que catholique,
il était de son devoir de combattre par tous les moyens les
communistes impies, y compris par des opérations de “tension”
qui, à première vue peuvent paraitre brutales et immorales. Il
expliqua que les communistes s’étaient eux aussi engagés dans
des méthodes sales, et que si Ordine Nuovo n’utilisait pas le
terrorisme pour les combattre, ils ne seraient jamais vaincus :
« le
terrorisme a évidemment l’inconvénient de tuer aussi des
personnes âgées, des femmes, des enfants, » a fait
remarquer Graziani. Il a ajouté que « des
opérations de cette nature sont encore considérées comme des
crimes méprisables et abjects, et surtout inutiles pour vaincre
un conflit. Mais les standards de la guerre révolutionnaire
renversent ces principes moraux et humanitaires. Ces formes
d’intimidation terroriste sont aujourd’hui considérées non
seulement comme acceptables, mais absolument nécessaires. »[5]
Autres attentats terroristes
Peteano n’est pas un cas isolé en Italie, mais fait partie d’une
longue série d’attentats terroristes qui a débuté en 1969. Le 12
décembre de cette année-là, quatre bombes explosaient sur les
places publiques à Rome et Milan, tuant 16 civils innocents et
en blessant 80 autres ; la plupart des victimes sont tombées à
Milan, Piazza Fontana. Après le massacre, comme le veulent les
règles de la stratégie de la tension, les services secrets
militaires italiens, le SID, a posé des bombes dans la villa de
l’éditeur gauchiste bien connu, Giangiacomo Feltrinelli, de
façon à pouvoir accuser de terrorisme les communistes et
d’autres membres de l’extrême gauche.[6] Ce
n’est que des années plus tard qu’on a appris que Feltrinelli
n’avait absolument rien à voir avec ce crime et qu’en réalité,
l’extrême droite italienne, dont Ordine Nuovo, avait perpétré
ces atrocités dans le but de promouvoir la stratégie de la
tension.
Les attentats les plus meurtriers eurent lieu en 1974, environ
deux ans après celui de Peteano.
Le 28 mai, une bombe explosait lors d’une manifestation
anti-fasciste à Brescia, où s’étaient rassemblées plus de 3000
personnes, tuant 8 personnes et en blessant 102 autres. Pour
couvrir les traces des poseurs de bombe d’extrême droite, la
place avait été nettoyée au jet d’eau plusieurs heures avant que
les magistrats enquêteurs ne puissent se rendre sur la scène de
crime pour protéger les preuves. Une commission du Sénat italien
a plus tard fait observer que « les
enquêtes menées immédiatement après le massacre étaient
caractérisées par un tel nombre d’erreurs incroyables que cela
laissait sans voix. »[7] Puis,
le 4 août, une bombe explosait dans le train express Italicus
reliant Rome à Berlin, tuant 12 civils innocents et en blessant
48 autres.
Mais l’attaque la plus meurtrière eut lieu en 1980, un samedi
après-midi chaud et ensoleillé qui se trouvait aussi être le
premier jour des grandes vacances d’été en Italie. Une explosion
massive ravagea la salle d’attente de seconde classe à la gare
de Bologne, tuant 85 personnes lors de la déflagration et
faisant 200 blessés.
La raison de ces attaques
Cette série d’attentats terroristes jeta le discrédit sur les
communistes italiens et propagea la terreur parmi la population
italienne, étant donné que personne ne savait qui allait être le
prochain sur la liste. Il était impossible de protéger
l’ensemble des infrastructures de transport, sans parler des
places publiques, et il était donc clair pour tous les
spécialistes en sécurité de l’époque que les sociétés
démocratiques seraient toujours vulnérables à ce genre
d’attentats terroristes. « Il
fallait s’en prendre aux civils, au peuple, aux femmes, aux
enfants, aux anonymes sans lien avec un quelconque jeu
politique, » a déclaré le néofasciste Vincenzo
Vinciguerra après son arrestation, lorsqu’il détailla la
stratégie de la tension à laquelle il avait lui-même participé.
« La
raison en est très simple, » a-t-il ajouté : « [ces
actions] étaient censées forcer les gens, le peuple italien, à
se tourner vers l’État pour demander plus de sécurité. C’était
la logique politique derrière tous ces massacres et les
attentats à la bombe qui restèrent impunis, du fait que l’État
ne peut pas s’accuser lui-même, ou se déclarer lui-même
responsable pour ce qui s’est passé. »[8]
Les révélations sur Gladio
Le juge italien Felice Casson, qui avait redécouvert la
stratégie de la tension, voulait savoir pourquoi des individus
au sein même du gouvernement et des services secrets italiens
avaient soutenu cette stratégie criminelle.
Après l’arrestation de Vinciguerra, le poseur de bombe de
Peteano, il décida d’en savoir plus. « Je voulais faire la
lumière sur ces années de mensonges et de mystères, c’est tout.
[Je voulais] que l’Italie, pour une fois, connaisse la vérité. »[9] À
l’été 1990, le juge Casson a demandé l’autorisation au premier
ministre italien Giulio Andreotti de pouvoir fouiller dans les
archives des services secrets militaires (SISMI) à Rome.
Permission lui fut accordée, et Casson fit une découverte
sensationnelle : il découvrit que sous le nom de code « Gladio »
(glaive), se cachait une armée secrète qui avait été mise en
place par les services de renseignement militaires italiens en
étroite collaboration avec la CIA dans les années qui avaient
suivi la Seconde Guerre mondiale. Cette armée secrète devait
fonctionne comme une unité de guérilla en cas d’invasion et
d’occupation de l’Italie par l’armée soviétique. Les données
mises à jour par Casson indiquaient que cette mystérieuse armée
Gladio était liée à l’OTAN et qu’en l’absence d’invasion de la
part des Soviétiques, elle semblait avoir manipulé la politique
italienne au travers d’un certain nombre d’actions secrètes
pendant la guerre froide dans le but d’affaiblir les communistes
italiens.
Casson informa par voie confidentielle une commission
parlementaire de ses recherches qui allaient bien au-delà de son
enquête initiale. Ce fut une surprise totale pour les Sénateurs,
et le 2 août 1990, le premier ministre et chef de l’exécutif
italien, Giulio Andreotti, ordonna « d’informer le parlement
dans les 60 jours à venir au sujet de l’existence, des
caractéristiques et des raisons d’être d’une structure parallèle
occulte dont on dit qu’elle a opéré au sein de nos services de
renseignements militaires, avec l’objectif de conditionner la
vie politique du pays. »[10]
Le 24 octobre 1990, Andreotti remit un rapport de 10 pages
intitulé « Ce
qu’on appelle le ‘SID parallèle’ – ou Affaire Gladio »
à la Commission d’enquête du Sénat dirigée par le sénateur
Gualtieri. Le rapport d’Andreotti confirmait l’existence d’une
armée secrète à l’intérieur des services secrets militaires,
connue sous le nom de code de “Gladio”. Andreotti ajouta que
cette structure existait toujours et était opérationnelle. Ne
voulant pas endosser seul toutes les conséquences de ces
accusations de conspiration, Andreotti insista le jour même
devant le parlement sur le fait que « chacun
des chefs de gouvernements avait été mis au courant de
l’existence de Gladio. »[11] Cette
affirmation mettait notamment en cause l’ex-premier ministre
Bettino Craxi (1983-1987) et surtout Francesco Cossiga, un
ancien premier ministre (1978 – 1979) qui occupait le poste de
président en 1990.
Les hauts magistrats furent obligés de prendre position. Craxi
affirma qu’il n’avait pas été informé, jusqu’au moment où il fut
confronté à un document sur Gladio portant sa propre signature
en tant que premier ministre. Cossiga expliqua qu’il était « fier
d’avoir pu garder le secret pendant 45 ans. »[12]
Dans son rapport, Andreotti confirmait les découvertes de
Casson, et expliquait que Gladio était la branche italienne
d’une armée secrète “Stay-Behind”
mise en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale par la
CIA et le SIFAR, dans le cadre d’un réseau international de
groupes clandestins de résistance dans les pays de l’OTAN, pour
combattre une éventuelle invasion soviétique. En cas d’invasion,
les armées Stay-Behind devraient
organiser un mouvement de résistance et opérer derrière les
lignes ennemies. Ces armées étaient supervisées et coordonnées
par deux centres top-secret de guerre non conventionnelle de
l’OTAN nommés Allied
Clandestine Committee (ACC) et Clandestine
Planning Committee (CPC).
Andreotti raconta qu’ « une fois constituée cette organisation
de résistance secrète, l’Italie était appelée à participer… aux
tâches du CCP (Clandestine
Planning Committee) fondé en 1959, opérant au sein
du SHAPE [Supreme
Headquarters Allied Powers Europe, de l'OTAN]…
; en 1964, les services secrets italiens intégrèrent également
l’ACC (Allied
Clandestine Committee).[13]
Ayant à faire face à des protestations acerbes de la presse
italienne, Andreotti affirma que les services secrets italiens
en général, et les membres de Gladio en particulier, n’avaient
rien à voir avec le terrorisme que l’Italie avait subi durant la
Guerre froide
Il expliqua que « les
individus présélectionnés n’ont pas de casier judiciaire, ne
font partie d’aucun mouvement politique et ne participent en
aucune manière à un quelconque mouvement extrémiste.
»[14]
Vinciguerra, le poseur de bombe de Peteano, qui s’était trouvé
au coeur de la stratégie de la tension, dément ces affirmations.
Dès la tenue de son procès en 1984, il avait déclaré : « Avec
l’attentat de Peteano et tous ceux qui ont suivi, plus personne
ne devrait douter de l’existence d’une structure active et
clandestine, capable d’élaborer dans l’ombre une telle stratégie
de tueries. Cette structure, » poursuivait-il, « est
imbriquée dans les organes mêmes du pouvoir. Il existe en Italie
une organisation parallèle aux forces armées, composée de civils
et de militaires, et à vocation antisoviétique, c’est-à-dire
destinée à organiser la résistance contre une éventuelle
occupation du sol italien par l’Armée rouge. » Sans
citer le nom de Gladio, Vinciguerra était clairement en train de
parler de l’armée secrète, plusieurs années avant que le premier
ministre Andreotti confirme son existence. Vinciguerra la
décrivit en 1984 comme « une
organisation secrète, une super organisation disposant de son
propre réseau de communications, d’armes d’explosifs et d’hommes
formés pour s’en servir. » Il insista sur le fait
que cette « super-organisation,
en l’absence d’invasion soviétique, avait reçu de l’OTAN l’ordre
de lutter contre un glissement à gauche du pouvoir dans le pays.
Et c’est ce qu’ils ont fait, avec le soutien des services
secrets de l’État, du pouvoir politique et de l’armée. »[15]
Les précédents chefs des services de renseignements italiens
furent choqués par les révélations du premier ministre
Andreotti, qui avait révélé ce que beaucoup considéraient comme
l’un des plus grands secrets. Le Général Vito Miceli, chef du
Renseignement italien de 1970 à 1974, protesta dans la presse
italienne : « J’ai
été emprisonné parce que je refusais de révéler l’existence de
cette super-organisation secrète, et voilà qu’Andreotti s’amène
devant le Parlement et raconte tout ! »[16]
La presse italienne se montra très critique à propos des
révélations sur Gladio et sur le fait que la CIA avait joué un
rôle central dans cette opération secrète. Le quotidien La
Stampa commenta : « Aucune
raison d’État ne peut justifier que l’on entretienne, couvre ou
défende une structure militaire secrète composée d’éléments
recrutés sur des critères idéologiques – dépendant ou, au
minimum, sous l’influence d’une puissance étrangère -, et
servent d’instrument pour un combat politique. Il n’y a pas de
mot pour qualifier cela, si ce n’est ‘haute trahison’ ou ‘crime
contre la Constitution.’ »[17]
Le parti communiste italien (PCI), convaincu que c’était lui et
non des troupes étrangères, qui était la vraie cible des armées
Gladio durant toute la période de la Guerre froide, fut
particulièrement scandalisé : « Avec
ce mystérieux SID parallèle, fomenté pour faire obstacle à un
impossible coup d’État de la gauche, nous avons surtout risqué
de nous exposer à un coup d’État de la droite… Nous ne pouvons
pas croire à cela…, que ce super-SID ait été accepté comme un
outil militaire destiné à opérer ‘dans le cas d’une occupation
ennemie’. Le seul véritable ennemi est et a toujours été le
parti communiste italien, c’est-à-dire un ennemi de l’intérieur. » [18]
Le rôle de la CIA
Aux États-Unis, cette affaire a été parfaitement ignorée par les
médias. Dans l’un des rares articles traitant du sujet, le Washington
Post, titrant « “CIA
Organized Secret Army in Western Europe; Paramilitary Force
Created to Resist Soviet Occupation” (La CIA
organise une armée secrète en Europe de l’Ouest ; des forces
paramilitaires créées pour résister à une occupation
soviétique), expliquait qu’un officier du renseignement avait,
sous couvert d’anonymat, déclaré : « Cette
opération concerne uniquement l’Italie. Nous n’avons aucun
contrôle sur elle. S’il y a des allégations selon lesquelles la
CIA est impliquée dans des activités terroristes en Italie,
elles sont totalement dépourvues de sens. »[19]
Il est extrêmement difficile de faire des recherches et de
clarifier les détails des opérations de stratégie de la tension,
car personne n’est prêt à confirmer publiquement qu’un tel a
ordonné ceci, ou qu’un autre a participé à une opération
terroriste qui a fait des victimes parmi les civils innocents et
a jeté l’effroi parmi la population visée avant d’accuser un
ennemi politique de l’avoir perpétrée. Si, comme dans le cas de
l’Italie, différents services de renseignement sont impliqués,
en l’occurrence le SISMI italien et la CIA américaine, alors la
tâche devient encore plus ardue, car les services commencent à
s’accuser et à se contredire mutuellement.
À la différence de l’officier anonyme du renseignement US cité
par le Washington
Post qui accusait implicitement les Italiens pour la
campagne de terreur subie par leur pays, le chercheur Philip
Willan a affirmé que le gouvernement US et sa communauté du
renseignement en étaient responsables : « Il
est loin d’être aisé de déterminer qui était responsable des
décisions au jour le jour quant à la stratégie de la tension.
Mais il ne fait pratiquement aucun doute que la responsabilité
globale pour cette stratégie repose sur les épaules du
gouvernement et des services secrets des États-Unis… Des
questions restent à propos de l’adoption de méthode ayant amené
à la mort de centaines de victimes innocentes. »[20]
Lors d’une émission télévisée italienne en 1990, l’amiral
Stansfiels Turner, directeur de la CIA entre 1977 et 1981, ne
voulut pas confirmer les déclarations de Willan et refusa
obstinément de répondre aux questions sur Gladio. Par respect
pour les victimes des nombreux massacres, le journaliste italien
qui menait l’interview insista pour que Turner clarifie ce
qu’était la stratégie de la tension. Turner arracha alors son
micro et cria : « j’ai
dit, pas de questions sur Gladio ! » et l’interview
prit fin.[21]
Certains officiers de la CIA se sont montrés plus bavards sur
les stratégies secrètes durant la Guerre froide et sur les
opérations illicites de la CIA. L’un d’eux s’appelle Thomas
Polgar, retraité en 1981 après une carrière de 30 ans à la CIA.
Questionné sur les armées secrètes de Gladio en Europe, Polgar
confirma que les armées secrètes Stay-Behind étaient
coordonnées « par
une sorte de groupe de planification de guerre non
conventionnelle lié à l’OTAN. » Polgar insista sur
le fait que « tous
les services secrets nationaux avaient été impliqués à un degré
ou à un autre, » ajoutant qu’« en
Italie dans les années 1970, certaines personnes étaient allées
un peu plus loin que la charte définie par l’OTAN. »[22]
Des membres du Parlement italien décidèrent de creuser
davantage. Huit sénateurs, la plupart appartenant au parti
démocratique de gauche (PDS pour Partito
Democratico della Sinistra), qui avait remplacé
l’ancien PCI après l’effondrement de l’Union soviétique en 1991,
poursuivirent leur enquête sur Gladio et la stratégie de la
tension.
Sous la présidence du sénateur Giovanni Pellegrini, ils
entendirent des témoins, prirent connaissance des documents et
présentèrent un rapport de 326 pages en 2000.[23] Les
anciens communistes conclurent que pendant la Guerre froide,
l’armée secrète Gladio avait, avec la CIA, les services secrets
militaires et certains néofascistes italiens, combattu les
communistes et les socialistes italiens de peur de trahir l’OTAN
« de
l’intérieur. » Le rapport expliquait que « ces
massacres, ces bombes, ces opérations militaires avaient été
organisés, promus, ou soutenus par des hommes à l’intérieur des
institutions italiennes, et comme cela a été découvert plus
récemment, par des gens liés aux structures de renseignement des
États-Unis. »[24]
D’après les importantes découvertes du Sénat italien, la
stratégie de la tension avait donc ét�� mise en oeuvre par des
membres appartenant aussi bien aux communautés de sécurité
nationale italiennes qu’américaines, dont la CIA et le SISMI,
qui avaient établi des liens avec des extrémistes pour poser les
bombes. Le Général Giandelio Maletti, ancien chef des services
de contre-espionnage italiens, l’a confirmé en mars 2001,
quelques mois seulement avant les attentats terroristes du 11
septembre 2001.
Lors d’un procès contre des membres d’extrême droite accusés
d’être impliqués dans le massacre en 1969 de Piazza FOntana à
Milan, le Général Maletti a déclaré : « La
CIA, appliquant les directives de son gouvernement, voulait
créer un nationalisme italien capable de stopper ce qu’elle
voyait comme un glissement à gauche, et pour cette raison, elle
peut avoir utilisé le terrorisme d’extrême droite… L’impression
générale était que les Américains étaient prêts à tout pour
arrêter le glissement de l’Italie à gauche. » Et il
a ajouté : « N’oubliez pas que Nixon était au pouvoir et que
c’était un homme étrange, un politicien très intelligent, mais
aussi quelqu’un qui prenait des initiatives peu orthodoxes. »[25]
Enquêtes aux États-Unis
Aux États-Unis, mis à part le travail souvent ignoré et pourtant
important de Jeffrey Mackenzie Bale[26],
il n’y a eu pratiquement aucunes recherches au sujet des
opérations de stratégie de la tension en Italie sponsorisées par
les USA. Arthur Rowse, un ancien employé du Washington
Post, est l’un des autres rares Américains à avoir
parlé de ce phénomène. Dans la conclusion d’un de ses précieux
articles, il dressait les “leçons de Gladio” dans ces termes :
« Aussi
longtemps que le public américain restera dans l’ignorance de ce
chapitre noir des relations étrangères américaines, les agences
qui en sont responsables ne subiront que peu de pression pour
modifier leurs méthodes. » Il ajoutait : « La
fin de la Guerre froide… a changé peu de choses à Washington.
Les USA… attendent toujours un véritable débat national sur la
fin, les moyens et les coûts de notre politique nationale de
sécurité. »[27]
La découverte en Italie des armées Stay-Behind de
l’OTAN en 1990 et le débat qui s’en est suivi sur la stratégie
de la tension eut des implications internationales importantes.
Alors que le détail de cette opération émergeait, le Timesde
Londres conclut que « cette
histoire semble sortie tout droit d’un roman policier. »[28] Pendant
un bref instant, le public a pu entrevoir le monde secret du
terrorisme, les mensonges, les opérations secrètes [cover-ups].
La presse britannique conclut que « Gladio, avec sa stratégie de
la tension, était l’un des secrets politico-militaires les mieux
gardés et les plus néfastes depuis la Seconde Guerre mondiale. »[29]
La réponse de l’OTAN
En révélant que l’OTAN coordonnait le réseau international
secret dont Gladio était seulement l’une des branches, Andreotti
avait mis une grosse pression sur le quartier général de l’OTAN
en Belgique. Mes recherches ultérieures ont confirmé que des
armées secrètes Stay-Behind ont
existé dans tous les pays d’Europe de l’Ouest, opérant sous
différents noms de code : au Danemark “Absalon“, en Allemagne
“TD BDJ“, en Grèce “LOK“, au Luxembourg “Stay-Behind“, aux
Pays-Bas “I&O“, en Norvège “ROC,” au Portugal “Aginter,” en
Suisse “P26,” en Turquie “Counter-Guerrilla,” et en Autriche
“OWSGV.”[30]
L’OTAN, la plus grande alliance militaire au monde, réagit de
manière confuse aux révélations sur ce réseau secret, en
diffusant deux commentaires contradictoires. Le 5 novembre 1990,
après presque un mois de silence, l’OTAN nia catégoriquement les
allégations d’Andreotti au sujet de l’implication de l’OTAN dans
l’opération Gladio et ses armées secrètes. Jean Marcotta,
porte-parole sénior de l’OTAN, déclara depuis le quartier
général de l’OTAN à Mons en Belgique, que « l’OTAN
n’a jamais considéré la guérilla ou les opérations clandestines
; elle s’est toujours occupée d’affaires militaires et de la
défense des frontières alliées. »[31]
Pourtant, le 6 novembre 1990, un autre porte-parole de l’OTAN
expliqua que le démenti de l’OTAN formulé les jours précédents
était faux. Par la suite, l’OTAN se contenta d’un court
communiqué à l’adresse des journalistes, expliquant que l’OTAN
ne faisait pas de commentaires sur des affaires relevant du
secret militaire et que Marcotta n’aurait rien dû dire du tout.[32] La
presse internationale protesta contre les politiques malsaines
de relations publiques de l’alliance militaire, et un journal
britannique écrivit : « Alors
que le continent subit choc après choc, un porte-parole de
l’OTAN formule un démenti : ‘’aucune connaissance de Gladio ou
de Stay-Behind’’. Puis, un communiqué de sept mots annonça que
ce démenti était “incorrect”, sans en dire plus. »[33]
Afin de clarifier la position de l’OTAN, j’ai appelé leur Bureau
de la Sécurité où Isabelle Jacob m’a informé qu’il était peu
probable que quiconque réponde à des questions sensibles sur
Gladio, et m’a conseillé de coucher par écrit ces questions et
de les leur faire parvenir par mon ambassade. La mission suisse
de l’OTAN à Bruxelles fit alors suivre mes questions sur Gladio
à l’OTAN, l’une d’elles étant : « Pourquoi
le porte-parole sénior de l’OTAN, Marcotta, a-t-il démenti
catégoriquement le 5 novembre 1990 toute connexion entre l’OTAN
et Gladio, tandis que le 7 novembre, un autre porte-parole de
l’OTAN affirmait que la déclaration formulée par Marcotta deux
jours auparavant était fausse ?»
En mai 2001, le chef du service de presse et des services médias
de l’OTAN, Lee McClenny, se fendit d’un simple démenti : « Je
ne suis pas au courant qu’un lien quelconque entre l’OTAN et
l’Opération Gladio’. De plus, je ne trouve aucun document
indiquant que quelqu’un du nom de Jean Marcotta ait été un
porte-parole de l’OTAN. »[34]
Mais en coulisses, l’OTAN fut forcée de communiquer plus
ouvertement sur cette affaire sensible de Gladio, comme le
révèlent d’autres sources. Après la débâcle des communiqués
publics, le secrétaire général de l’OTAN, Manfred Wörner, briefa
à huis clos les différents ambassadeurs de l’OTAN sur Stay-Behind,
le 7 novembre 1990. Un article paru dans la presse espagnole,
commentait ce briefing : « Le
SHAPE (Supreme Headquarters Allied Powers Europe) qui est
l’organe dirigeant de l’appareil militaire de l’OTAN, a
coordonné les actions de Gladio, d’après les révélations du
Secrétaire général Manfred Wörner lors d’une réunion avec les
ambassadeurs de l’OTAN des 16 nations alliées. »
L’article ajoutait que « Wörner avait, semble-t-il, demandé plus
de temps, de façon à pouvoir mener une enquête sur la fameuse
déclaration “aucune connaissance” » formulée par l’OTAN la
veille. « Ces
précisions ont été présentées à l’occasion de la réunion du
Conseil Atlantique au niveau des ambassadeurs, qui, selon
certaines sources, se tint le 7 novembre. »[35]
Selon ce même article, Manfred Wörner, le secrétaire général de
l’OTAN, avait lui-même été briefé par un officier de haut rang
de l’OTAN en Europe, le général américain John Galvin, suppléant
du Commandant suprême des forces alliées en Europe (Supreme
Allied Commander Europe, ou SACEUR).
Au cours de cette réunion à huis clos, le secrétaire général de
l’OTAN expliqua que le militaire en question – autrement dit le
général John Galvin, Commandant suprême des forces alliées en
Europe -, avait indiqué que le SHAPE coordonnait les opérations
de Gladio.
À partir de ce moment-là, la position officielle de l’OTAN fut
de ne plus commenter des secrets officiels.[36]
L’OTAN n’a jamais fait de commentaires publics sur la stratégie
de la tension, ou sur le fait que des plans ou du personnel de
l’OTAN aient été impliqués, et n’a divulgué aucun autre détail
sur les armées secrètes. « Étant
donné qu’il s’agit d’une organisation secrète, je ne m’attends
pas à ce qu’il soit répondu à beaucoup de questions, même si la
Guerre froide est terminée, » a déclaré à la presse
un diplomate de l’OTAN, qui a insisté pour rester anonyme. «S’il
existait le moindre lien avec des organisations terroristes, ce
genre d’information serait enterrée très profondément. Sinon,
qu’y a-t-il de mal à prendre des précautions pour organiser la
résistance si vous pensez que les Soviétiques pourraient
attaquer ? »[37]
Ce refus de commenter de la part de l’OTAN ne fut pas du goût du
parlement européen, lequel dans une résolution spéciale sur les
armées secrètes et la stratégie de la tension, déclara sèchement
que « ces
organisations opèrent et continuent d’opérer en dehors de tout
cadre légal, et ne sont soumises à aucun contrôle parlementaire. »
Le parlement écrivit ensuite qu’il « appell[ait]
à une enquête complète sur la nature, la structure, les
objectifs et tous les autres aspects de ces organisations
clandestines. » Une telle enquête ne vit cependant
jamais le jour, du fait qu’aussi bien l’OTAN que ses États
membres étaient préoccupés par les problèmes qu’une telle
enquête pourrait créer. Pourtant le parlement européen déclara
clairement qu’il « protestait
vigoureusement contre les déclarations de certains officiers
américains de SHAPE et de l’OTAN à propos de leur droit
d’encourager l’établissement en Europe d’un service secret
clandestin et d’un réseau opérationnel. » Et les
choses en restèrent là.[38]
En France
![](img34.jpg)
Comme nous l’avons mentionné, l’Italie ne fut pas le seul pays
où des réseaux Stay-Behind furent
impliqués dans des opérations de stratégie de la tension. Des
opérations terroristes contre la population civile eurent lieu
également en Belgique, en Turquie et en Grèce. Comme en Italie,
les armées secrètes ont été formées et équipées par la CIA et
son homologue britannique, le MI6, et ont opéré comme une
branche secrète des services secrets militaires du pays. Les
opérations dans ces trois pays sont détaillées dans mon livre « Les
armées secrètes de l’OTAN »[39] Dans
le présent article, je n’ai la place que pour une brève
discussion sur les opérations en France. Les révélations du
premier ministre italien Giulio Andreotti prirent par surprise
François Mittérrand, le président socialiste français de 1981 à
1995. Alors qu’il était interrogé par la presse française
en 1990, Mitterrand tenta de se distancier de l’affaire des
armées secrètes en France, affirmant qu’elles avaient été
dissoutes depuis longtemps. Il a notamment déclaré : « Lorsque
je suis arrivé, il n’y avait plus grand-chose à dissoudre. Juste
quelques vestiges, dont j’ai appris l’existence avec étonnement,
car tout le monde avait oublié de m’en parler. »[40]
Mais le premier ministre italien Andreotti ne parut pas
apprécier particulièrement la manière dont la Grande Nation [en
français dans le texte – NdT] essayait de minimiser son rôle
dans le complot Stay-Behind.
Il déclara sans ambages à la presse que l’armée secrète en
France, loin d’avoir été dissoute depuis longtemps, avait
récemment – le 24 octobre 1990 – envoyé des représentants à une
réunion secrète au comité d’Allied
Clandestine Committee(ACC) de l’OTAN sur Stay-Behind à
Bruxelles. Lorsque ces allégations furent confirmées, cela créa
un embarras certain à Paris. Mitterrand se refusa alors à tout
commentaire.
Un officier de la CIA à la retraite, Edward Barnes, qui avait
travaillé en France durant la 4e république avant de quitter le
pays en 1956, voulut apporter plus de précisions. Barnes
expliqua qu’alors que la menace d’un parti communiste fort
persistait en France, les services secrets militaires (SDECE,
pour Service de Documentation extérieure et de
Contre-Espionnage), sous la direction d’Henri Alexis Ribière,
mit sur pied une armée secrète anticommuniste. « Il
y avait probablement beaucoup de Français qui voulaient être
prêts si quelque chose se produisait, » indiqua
Barnes. Se rappelant son propre travail en France, il expliqua
que l’invasion soviétique était la première raison d’être de
l’armée secrète française, mais que la promotion d’activités
politiques anticommunistes dans le pays « pourrait
avoir constitué une deuxième motivation. »[41]
Actions terroristes en Algérie
Au début des années 1960, une grande partie de l’armée française
et des services secrets commencèrent à désapprouver fortement
l’intention du président Charles de Gaulle de permettre à
l’Algérie, une ancienne colonie, de devenir indépendante.
L’armée secrète, percevant De Gaulle comme un ennemi, s’engagea
d’évidence dans des opérations de stratégie de la tension contre
ce projet. Certaines “actions terroristes” contre De Gaulle et
son plan de paix pour l’Algérie furent menées par des groupes
qui incluaient “un nombre limité d’individus” du réseau Stay-Behind français,
comme l’admit en 1990 l’amiral Pierre Lacoste, ex-directeur des
services de renseignements français (DGSE, ancien SDECE).
Lacoste, qui a démissionné en 1985 après que la DGSE eut fait
exploser le Rainbow Warrior, le navire de Greenpeace alors que
celui-ci protestait contre les essais nucléaires dans le
Pacifique, a déclaré que malgré ses liens avec le terrorisme, le
programme Stay-Behind en
France était justifié par les éventuels plans d’invasion
soviétique.[42]
Un des promoteurs des techniques de terreur de la stratégie de
la tension était Yves Guerin-Serac, un militant catholique
anticommuniste. C’était un spécialiste de la guerre de l’ombre,
il avait servi en Corée, au Vietnam et (en tant que membre de la
11e demi-brigade parachutiste de choc), pendant la guerre
d’Algérie. L’écrivain et spécialiste des services secrets
français, Roger Faligot, appelait cette unité « le
fer de lance de la guerre clandestine en Algérie entre 1954 et
1962. »[43] En
1954, environ 300 hommes appartenant à cette unité spéciale
avaient débarqué en Algérie. La plupart avaient une grande
expérience des opérations secrètes et de la guérilla, puisqu’ils
arrivaient directement du Vietnam après que la défaite de la
France lors de la bataille de Diên Biên Phu ait mis fin aux
velléités de la France de recoloniser ce pays. La mission de
Serac et de ses collègues était parfaitement claire : abattre le
Front le Libération algérien (FLN) en Afrique du Nord par tous
les moyens, après les humiliantes défaites de la Seconde Guerre
mondiale et du Vietnam. Ces efforts incluaient l’appel à des
opérations de stratégie de la tension visant à discréditer le
mouvement de libération algérien.
Après la défaite de la France et la déclaration d’indépendance
de l’Algérie en 1962, la guerre secrète ne prit pas fin pour
Guerin-Serac, qui tout comme un certain nombre d’autres
officiers, se sentaient trahis par le gouvernement français et
décidèrent de continuer leur guerre secrète.
Serac savait exactement comment mener des opérations de
stratégie de la tension pour discréditer les communistes et les
membres des mouvements de libération tout autour du globe. Dans
un texte de novembre 1969, « Notre
activité politique », Serac et d’autres officiers
soulignèrent le fait qu’ils avaient dû infiltrer l’ennemi, et
perpétrer des atrocités en son nom. Ils écrivaient : « La
première phase de notre activité politique consiste à créer le
chaos dans toutes les structures du régime… La destruction de
l’État démocratique doit s’opérer autant que possible sous
couvert d’activités communistes et prochinoises… De plus, nous
avons des gens infiltrés dans ces groupes et évidemment, nous
devons adapter nos actions à l’esprit de ce milieu – par la
propagande et des actions d’un genre qui semble émaner de nos
adversaires communistes… Cela créera un sentiment d’hostilité
envers ceux qui menacent la sécurité dans chacun de ces pays, et
nous devons en même temps nous dresser comme les défenseurs des
citoyens contre la désintégration qu’apportent le terrorisme et
la subversion. »[44]
Le juge italien Guido Salvini, qui a enquêté sur la stratégie de
la tension, a montré que Serac avait effectivement mené à bien
ses plans de stratégie de la tension. Il écrivit : « En 1975, le
groupe Guerin-Serac, avec l’Américain Salby et des militants
d’extrême droite français, italiens et espagnols, organisèrent
une série d’attentats à la bombe… Les bombes visaient les
ambassades algériennes dans différents pays, la France,
l’Allemagne, l’Italie et la Grande-Bretagne… En réalité, ces
attentats étaient l’oeuvre du groupe de Guerin-Serac, qui
montrait par là ses grandes facultés de camouflage et
d’infiltration… La bombe posée devant l’ambassade algérienne à
Frankfort n’explosa pas, et fut méticuleusement analysée par la
police allemande… Il faut noter la particulière complexité de
fabrication de cette bombe. Elle contenait du C4, un explosif
utilisé exclusivement par les forces US qui n’a jamais été
utilisé dans aucun attentat par des anarchistes. »[45]
Ces révélations sur Guerin-Serac ainsi que leurs propres
affirmations fournissent des preuves évidentes que les armées
secrètes en Europe de l’Ouest ont utilisé le terrorisme et tué
des civils innocents pour mener à bien leurs objectifs
politiques. Ces armées secrètes, comme nous l’avons vu,
opéraient sous la supervision de la CIA et de l’OTAN,
c’est-à-dire sous le contrôle d’agents militaire et de
renseignement américain.
Mais revenons à la question des opérations de stratégie de la
tension aux USA.
Aux États-Unis
Aux États-Unis, la stratégie de la tension fut largement prônée
au début des années 1960 par les plus hauts gradés du Pentagone
– le général Lyman Lemnitzer, Chef d’état-major interarmes -,
comme moyen de convaincre l’opinion publique américaine de la
nécessité d’envahir Cuba et de renverser Fidel Castro.
Lemnitzer, qui mourut en 1988, était l’un des officiers de haut
rang envoyés par les USA pour négocier la reddition de l’Italie
en 1943 et celle de l’Allemagne en 1945. Après avoir combattu en
Corée, il devint en 1960 chef d’état-major interarmes. Après le
fiasco de la CIA lors de la tentative d’invasion de la Baie des
Cochons en 1961, les plus hauts dirigeants du Pentagone, dont
Lemnitzer, avancèrent que les techniques de stratégie de la
tension devaient être utilisées contre la population américaine
afin de créer un prétexte pour entrer en guerre. Sous le nom d’
« Opération Northwood », ils mirent au point un ensemble
d’opérations combinées de stratégie de la tension visant à
choquer l’opinion publique US et à discréditer Fidel Castro.
À cette époque, le président John F. Kennedy et son ministre de
la Défense, Robert McNamara, s’opposèrent à de telles actions,
qui impliquaient la mort de citoyens américains et la
manipulation sur une vaste échelle de la population américaine.
Le plan de Lemnitzer fut ainsi rangé dans les tiroirs.[46]
Comme pour la plupart des opérations de stratégie de la tension,
il se passa de nombreuses années avant que l’opinion publique
n’ait connaissance de l’Opération Northwood. C’est grâce au
remarquable chercheur américain James Bamford que les documents
sur l’opération top secrète Northwood furent portés à la
connaissance du public en avril 2001, quelques mois seulement
avant les attentats terroristes du 11-Septembre, lorsque Bamford
publia son livre : Body
of Secrets: An Anatomy of the Ultra Secret National Security
Agency. Cela se produisit donc 40 ans après que les
plans de Northwoods aient été classés « top-secret » par le
Pentagone. Les documents originaux sont désormais accessibles en
ligne.[47]
Les documents sur l’opération Northwoods détaillent comment le
Pentagone avait planifié ses opérations de stratégie de la
tension. Parmi ces actions, les officiers US suggéraient, de
développer une fausse « campagne
de terrorisme cubain dans la zone de Miami et dans d’autres
villes de Floride, et même à Washington », de
simuler une attaque par l’aviation cubaine contre un avion de
ligne, de « couler
un bateau de réfugiés cubains (réel ou simulé) », de
concocter un incident « Remember
the Maine » en faisant exploser un navire américain
dans les eaux territoriales cubaines et d’accuser Cuba de
sabotage.
Depuis que Bamford a publié ces documents sur l’Opération
Northwoods, ceux qui s’intéressent à la stratégie de la tension
se demandent jusqu’où certains groupes radicaux au sein du
Pentagone étaient prêts à aller et quelles étaient les chances
pour que le peuple américain ou ceux des autres pays découvrent
ou parviennent à stopper de tels plans. Bamford pose notamment
la question de savoir si l’Opération Northwoods était le plan le
plus démoniaque jamais conçu par le gouvernement US, ou si
l’incident du golfe de Tonkin en 1964 – qui précipita l’entrée
en guerre des USA au Vietnam, laquelle se solda par la mort de
56 000 soldats américains et de 3 millions de Vietnamiens –
avait constitué un exemple typique d’opération de stratégie de
la tension élaborée et mise en oeuvre par le Pentagone.
« À
la lumière des documents sur l’Opération Northwoods, »
conclut Bamford, « il
est clair que le fait de tromper la population et de fabriquer
des guerres pour y envoyer des Américains se faire tuer
constituait une politique standard et approuvée par les plus
hauts niveaux de dirigeants au Pentagone. »[48]
Conclusion
Les deux principaux arguments contre l’idée que les attentats du
11-Septembre ont été menés par le gouvernement US et son armée
ne sont que des a priori. L’un est que les gouvernements de pays
occidentaux civilisés en général, et le gouvernement US en
particulier ne feraient jamais une chose aussi horrible. L’autre
est que si les attentats du 11/9 avaient été perpétrés par des
forces internes au gouvernement des États-Unis, cela n’aura pas
pu rester secret aussi longtemps.
Les informations contenues dans cet article montrent que ces
deux a priori sont tout à fait discutables.
Daniele Ganser
Journal of 9/11 Studies Volume 39, mai 2014
(Titre original : La « stratégie de la tension » dans l’après
Guerre froide)
http://www.journalof911studies.com/resources/2014GanserVol39May.pdf
Traduction GV pour IlFattoQuotidiano.fr
* * *
Note de l’éditeur :
L’objectif du Journal
of 9/11 Studies est de publier les travaux de
recherche et les analyses permettant de faire la lumière sur les
événements du 11-Septembre. Par principe, nous publions
seulement des articles inédits, mais il arrive que nous
trouvions justifié de republier un article déjà paru. C’est le
cas ici. Cet article est en effet extrait, avec certaines
modifications autorisées par l’auteur, et l’éditeur, du livre de
David Ray Griffin et Peter Dale Scott, “9/11 and American
Empire: Intellectuals Speak Out”, Vol. 1 (Olive Branch Press,
2006).
Daniele Ganser est
un chercheur spécialiste de l’Opération Gladio, laquelle est
selon nous cruciale pour bien comprendre le 11-Septembre et la
Guerre globale contre la Terreur. (Voir son livre « Les
armées secrètes de l’OTAN : Réseaux Stay-Behind, Gladio et
terrorisme en Europe de l’Ouest,
Editions Demi-Lune, 2007). En plus de faire la lumière sur les
méthodes de terreur et de manipulation qui ont eu cours en
Occident, cet article du Dr. Ganser, republié ici, offre des
réponses intéressantes à deux des principales objections souvent
opposées à ceux qui contestent la version officielle du
11-Septembre, à savoir : « Il est certain qu’aucun gouvernement
occidental ne perpètrerait un tel crime contre sa propre
population, » et « Quelqu’un aurait parlé. »
Le Dr. Ganser dirige l’institut suisse pour la Paix et la
recherche sur l’énergie, à Bale, et est membre du 9/11 Consensus
Panel : http://www.consensus911.org/
Notes de l’auteur :
1.
Wikipedia, “Guerre psychologique”, http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_psychologique.
2.
En Italie durant la Guerre froide, les services secrets
militaires ont été impliqués dans nombre d’opérations secrètes
qui, lorsqu’elles ont été découvertes par la population, ont
déclenché des protestations publiques, lesquelles ont forcé les
services de renseignement à changer de nom. Créés le 30 mars
1949, soit 4 ans après la défaite de l’Italie dans la Seconde
Guerre mondiale, et quelques jours seulement avant que l’Italie
ne devienne un membre fondateur de l’OTAN, les services secrets
militaires prirent le nom de SIFAR (Servizio
Informazioni delle Forze Armate), puis SID (Servizio
Informazione Difesa) de 1965 à 1977, avant d’adopter
son appellation actuelle, SISMI (Servizio
per le Informazioni e la Sicurezza Militare).
3.
Hugh O’Shaughnessy, “Gladio:
Europe’s Best Kept Secret,” The
Observer, 7 juin 1992.
Shaughnesssy écrit : «C’étaient
des agents qui devaient “rester derrière” (‘stay behind’) au cas
où l’Armée rouge envahissait l’Europe de l’Ouest. Mais dans
certains pays, ce réseau qui avait été mis en place avec les
meilleures intentions a dégénéré en groupes terroristes prônant
l’agitation politique d’extrême droite. »
4.
Newsnight, BBC1, 4 avril 1991
5.
Cité dans « Sénat
de la République italienne : Commission d’enquête parlementaire
sur le terrorisme en Italie et sur les causes de l’échec dans
l’arrestation des responsables des tragédies : le terrorisme,
les tragédies et le contexte politico-historique. »
(Rome : rédigé par le président de la Commission, le sénateur
Giovanni Pellegrin, 1995), p 261.
6.
Sénat de la république, p 157.
7.
Sénat de la république, p 220.
8.
Newsnight, BBC1, 4 avril 1991
9.
Observer, 18
novembre 1990.
10.
Mario Coglitore, ed., La
Notte dei Gladiatori. Omissioni e silenzi della Repubblica (Padoue,
1992) p 131.
11.
Leo Müller, Gladio:
Das Erbe des Kalten Krieges: Der NATO- Geheimbund und sein
deutscher Vorläufer(Hamburg: Rowohlt, 1991) p. 27.
12.
Reuters, 12 novembre 1990.
13.
Franco Ferraresi, “A
Secret Structure Codenamed Gladio,” Italian
Politics: A Review, 1992: p. 30.
Ferraresi cite directement le document qu’Andreotti a remis à la
Commission parlementaire. Le quotidien italien L’Unità l’a
publié dans une édition spéciale du 14 novembre 1990. Il figure
également dans le livre de Jean Francois Brozzu-Gentile, L’affaire
Gladio (Paris: Editions Albin Michel, 1994).
14.
Ferraresi p. 31, citant directement le document d’Andreotti.
15.
Ed Vulliamy, “Secret
Agents, Freemasons, Fascists… and a Top-level Campaign of
Political ‘Destabilisation’: ‘Strategy of Tension’ That Brought
Carnage and Cover-up,” Guardian,
5 décembre 1990.
16.
Dans le magazine politique italien, Europeo,
16 novembre 1990. Miceli a effectivement été condamné à une
peine de prison dans les années 1970 et a passé 6 mois dans un
hôpital militaire. En 1974, le magistrat enquêteur, Giovanni
Tamburino, au cours de ses investigations sur le terrorisme
d’extrême droite en Italie, avait pris l’initiative inédite
d’arrêter le général Miceli en l’accusant d’avoir « promu,
mis en oeuvre et organisé, avec d’autres, une association
secrète mêlant militaires et civiles et visant à provoquer une
insurrection armée afin d’amener des modifications illégales de
la Constitution de l’État et à la forme de gouvernement. »
(Voir aussi le magazine politique britannique Statewatch,
janvier 1991). Lors de son procès en novembre 1974, Miceli,
auparavant responsable du Bureau de sécurité de l’OTAN, confirma
avec nervosité qu’une unité spéciale avait bien existé au sein
des services secrets militaires, le SID, mais que ce n’était pas
lui qu’il fallait blâmer : ‘’Un
super-SID sous mes ordres ? Bien sûr ! Mais je ne l’ai pas
moi-même organisé pour faire un coup d’État. C’étaient les
États-Unis et l’OTAN qui m’ont demandé de le faire ! » (Voir
aussi Brozzu-Gentile, p. 105.) C���était vers la fin de sa
carrière dans les services secrets militaires italiens. Après
avoir purgé sa peine de prison, il devint parlementaire en 1976
et bénéficia pour le restant de sa vie de l’immunité
parlementaire en tant que député fasciste du Movimento
Sociale Italiano (MSI). Réélu par deux fois, il
démissionna en 1987 à cause d’une maladie et mourut trois ans
plus tard.
17.
Cité dans Ferraresi, p. 31.
18.
Norberto Bobbio, cité dans Ferraresi, p. 32.
19.
Washington Post,
14 novembre 1990. Le seul autre article du Post qui
comporte le mot-clef “Gladio” fut publié le 8 août 1993. La
comparaison avec les 39 articles sur Gladio parus dans le
journal britannique Guardianmontre
bien la pauvreté de la couverture médiatique de Gladio aux
États-Unis.
20.
Philip P. Willan, Puppetmasters:
The Political Use of Terrorism in Italy (Londres:
Constable, 1991) p. 28.
21.
Independent,
1er décembre 1990.
22.
Jonathan Kwitny, “The
CIA’s Secret Armies in Europe,” Nation,
6 avril 1992: p. 445.
23.
Sénat de la République italienne : Commission d’enquête
parlementaire sur le terrorisme en Italie et sur les causes de
l’échec dans l’arrestation des responsables des tragédies :
tragédies et terrorisme dans l’Italie de l’après-guerre à 1974.
Rapport du Groupe démocratique de gauche, l’Ulivo (Rome, juin
2000). Cité dans « Le
rapport de l’an 2000 du Sénat italien sur Gladio et les
massacres.”
24.
Cité dans Philip Willan: “US ‘Supported Anti-left Terror in
Italy.’
Le rapport affirme que Washington a utilisé la stratégie de la
tension durant la Guerre froide pour stabiliser le
Centre-Droit, Guardian,
24 juin 2000.
25.
Philip Willan, “Terrorists
‘Helped by CIA’ to Stop Rise of Left in Italy,” Guardian,
26 mars 2001.
Willan, un expert des actions secrètes américaines en Italie, a
publié le remarquable ouvrage Puppetmasters (Voir note 24).
26.
Jeffrey Mackenzie Bale, “The
‘Black’ Terrorist International: Neo-Fascist Paramilitary
Networks and the ‘Strategy of Tension’ in Italy, 1968–1974”
(Ann Arbor, Mich.: UMI Dissertation Services, 1996).
27.
Arthur Rowse, “Gladio:
The Secret US War to Subvert Italian Democracy,” Covert
Action Quarterly p. 49 (été 1994).
28.
Times (Londres)
19 novembre 1990.
29.
Observer, 18
novembre 1990.
30.
Voir Daniele Ganser, “Les armées secrètes de l’OTAN”, Demi-Lune,
2007.
31.
European,
9 novembre 1990.
32.
European,
9 novembre 1990. Il semble que le représentant de l’OTAN qui a
émis ce correctif soit Robert Stratford.
Cf. Regine Igel, Andreotti: Politik
zwischen Geheimdienst und Mafia (Munich: Herbig
Verlag, 1997) p. 343.
33.
Observer,
18 novembre 1990.
34.
Lettre de Lee McClenny, resp. des relations presse de l’OTAN, à
l’auteur, datée du 2 mai 2001.
35.
“Gladio.
Un misterio de la guerra fria. La trama secreta coordinada por
mandos de la Alianza Atlantica comienza a salir a la luz tras
cuatro decadas de actividad,” El
País, 26 novembre 1990.
36.
El País.
37.
Reuters News Service, 15 novembre 1990.
38.
Débats au Parlement européen (transcriptions officielles), 22
novembre 1990.
39.
Voir note 31.
40.
Cité dans Brozzu-Gentile, p. 141.
Egalement par Associated Press, p. 13, novembre 1990.
41.
Kwitny, “The
CIA’s Secret Armies in Europe”, pp. 446, 447.
42.
Kwitny.
43.
Roger Faligot et Pascal Krop, La
Piscine: Les Services Secrets Français 1944–1984 (Paris:
Editions du Seuil, 1985), p. 165.
44.
Cité dans Stuart Christie, Stefano Delle Chiaie (Londres: Anarchy
Publications, 1984) p. 32. Également dansLobster (octobre
1989), p.18. Ce document aurait été trouvé dans l’ancien bureau
de Guerin-Serac après la révolution portugaise de 1974.
45.
Commission d’enquête parlementaire sur le terrorisme en Italie
et sur les causes de l’échec dans l’arrestation des responsables
des tragédies. 9e session, 12 février 1997 (www.senato.it/parlam/bicam/terror/stenografici/steno9.htm).
46.
Après avoir refusé le plan de Lemnitzer, Kennedy l’envoya en
Europe au poste de Commandant suprême des forces alliées de
l’OTAN de janvier 1963 à juillet 1969. Il fut remplacé par le
général Andrew Goodpaster, qui occupa le poste de SACEUR de 1969
à 1974, c’est-à-dire pendant les années au cours desquelles les
opérations terroristes eurent lieu en Italie.
47.
Sur la homepage de
la National
Security Archive à www.gwu.edu/~nsarchiv/news/20010430.
48.
James Bamford, Body
of Secrets: Anatomy of the Ultra-Secret National Security Agency (New
York: Anchor Books, 2002), p. 91.
|